Ars Goetia :Bonjour à tous les deux, c’est un réel plaisir de faire cette interview avec vous et de parler de ce premier album incroyable. Comment est né Los Males Del Mundo ?
Dany : Avec Cris, nous nous connaissons depuis plus de dix ans. Nous avons toujours voulu créer de la musique ensemble, mais nos emplois du temps serrés ne le permettaient pas. À l’époque, nous avions tous les deux nos propres projets, donc c’était difficile. Mais en 2016, nous avons pu commencer à travailler ensemble sur ce projet et nous n’avons jamais cessé depuis.
Parallèlement, avec Nikita, nous parlions aussi depuis longtemps de faire quelque chose. Nous nous connaissons depuis environ 2009 et quand je lui ai montré les idées sur lesquelles nous avions bossé, nous avons commencé à en parler et c’est ainsi que nous avons tous fini par travailler sur Los Males Del Mundo….
AG :Le premier EP éponyme vous a permis de décrocher un contrat avec Northern Silence Productions. Dites-nous comment cela a été possible ?
Cristian : Au début, nous avons eu une série de propositions de quelques labels intéressés, mais après plus de 3 ans de travail, la pandémie nous a rattrapés avec un album terminé mais sans label.
Nous avions l’EP, nous l’avons donc sorti tout en cherchant un label qui veuille sortir l’album.
Depuis plusieurs années, nous avions les yeux rivés sur NSP pour leurs sorties et pour les bons commentaires des amis qui avaient travaillé avec eux dans le passé, alors nous les avons contactés. Nous avons reçu une réponse le lendemain et nous avons alors commencé à régler les détails de la signature du contrat.
AG : Cinq chansons intenses, agressives et mélancoliques pour ce premier LP, dites-nous en plus sur la composition de ces dernières.
C : Nous avons, disons, une façon cyclique de composer, c’est comme un processus d’allers et retours. D’abord nous écrivons la musique, la mélodie, puis nous expérimentons les différents schémas rythmiques, enfin Dany commence à écrire les paroles et il fait les maquettes des pistes de voix. Parfois, nous ne sommes pas sûrs à 100 % du résultat final, alors nous revenons en arrière, changeons quelque chose et nous recommençons depuis le début. C’est seulement à ce moment-là que nous approfondissons les détails. C’est en gros le processus d’écriture des chansons.
Nous savons que ce n’est pas le plus rapide, mais c’est celui que nous pensons être le meilleur pour ce projet, parce la musique qui résulte de tout ce processus laborieux est entièrement cohérente, puisque les paroles, le chant et la musique se créent mutuellement pendant tout le cycle.
AG : Les paroles sont très sombres et montrent le côté obscur de l’être humain. Expliquez-nous le concept de cet album et votre vision de la vie à travers vos textes.
D : C’est une question que l’on nous pose fréquemment, mais je m’abstiens d’y répondre autant que possible, car je pense que ce serait une erreur d’expliquer quelque chose qui doit être développé avec l’album lui-même. Et ce serait un peu injuste pour l’auditeur, qui peut certainement trouver quelque chose de personnel qui pourrait même être meilleur que ce qui m’a motivé à écrire. Le côté sombre de l’âme humaine avec ses tourments, ses échecs, ses questionnements est exprimé d’une certaine manière dans les paroles. Je pense que les réponses sont là, entre les lignes, et peuvent être comprises si l’on s’immerge complètement dans l’album et son concept.
AG : Vous avez choisi de chanter en anglais, pourquoi pas en espagnol ?
D : J’avais l’habitude d’écrire les paroles en anglais, mais j’ai remarqué que j’étais plus préoccupé de la rime que du fond. Donc, pour ce projet, j’ai choisi d’écrire en espagnol puis de traduire en anglais afin de me sentir libre d’exprimer mes idées sans limites.
Bien que l’espagnol soit une langue magnifique et qu’une grande partie de sa beauté se perde dans la traduction, je pense que le résultat est positif puisque l’anglais peut être compris par la majorité des auditeurs.
AG : On peut remarquer une narration en espagnol au début et à la fin de l’album. Expliquez-nous de quoi il s’agit.
D : Elles sont tirées du film classique « Le Septième Sceau » (Det sjunde inseglet), mais elles ne sont pas liées à l’histoire du film. Ces lignes et ces mots sont si puissants qu’ils transcendent tout contexte, tout temps, tout lieu. Ils représentent la question que nous nous posons lorsque nous sommes confrontés à la mort, l’une des questions au cœur de presque toute la philosophie.
C’est un dialogue très puissant, qui a été repris d’innombrables fois, mais nous avons pensé que ce serait une bonne idée d’utiliser le doublage espagnol pour le faire connaître aux auditeurs hispanophones qui ne l’ont peut-être jamais entendu.
Comme je l’ai déjà dit, cela n’a rien à voir avec le film lui-même, mais ces lignes sont si puissantes qu’elles transcendent tout contexte et c’est pourquoi nous avons décidé de les utiliser.
AG : J’ai lu que Friedrich Nietzsche est une source d’inspiration très importante pour vos textes. Dites-nous en plus sur votre relation avec l’œuvre du philosophe.
D : Mon intérêt pour Nietzsche a commencé quand j’étais très jeune, à l’âge de 10 ans environ, même si à l’époque, sa lecture me générait plus de questions que de réponses. Bien que, maintenant que j’y pense, cela n’ait pas beaucoup changé jusqu’à aujourd’hui. J’ai toujours été très curieux de la philosophie et c’était l’une des carrières auxquelles je me destinais, mais j’ai choisi la psychologie à la place (je travaille actuellement comme psychologue clinicien).
Donc, je pense que le comportement humain et ses mystères m’ont toujours fasciné, et peut-être pour cette raison, ce sont les sujets qui me semblent les plus intéressants lorsque j’écris. C’est pourquoi j’essaie de ne pas me concentrer uniquement sur un auteur mais sur les idées de plusieurs, et c’est ce qui dirige mon écriture.
AG : A propos de la musique, on peut remarquer des inspirations de la troisième vague européenne de black metal plutôt que des sons sud-américains. D’où viennent ces influences ?
C : Dany a commencé à écouter du Punk et du Rock dès son plus jeune âge et moi, grâce à l’influence de ma famille, j’ai débuté avec des groupes de Rock classique et de Hard Rock des années 70.
Nous avons grandi en découvrant et en appréciant tous les genres de métal, et en accrochant particulièrement au Black Metal et au Doom Metal des années 90.
Bien que nous ayons toujours écouté le métal des États-Unis, par exemple, son style technique ou même son aspect brutal n’a jamais eu un grand impact sur nous. Nous avons toujours été principalement axés sur le son plus mélodique venant du vieux continent, et bien sûr, depuis notre plus jeune âge, nous sommes influencés par toute l’énergie émotionnelle et la passion que les groupes de métal d’Amérique du Sud nous ont transmises. Sans aucun doute, LMDM est un mélange de toutes ces influences.
AG : LMDM est un groupe composé de deux hommes. Nikita Kamprad voulait travailler avec vous en tant que producteur et guest musicien. Comment cette rencontre a-t-elle pu se faire ?
D : Avec Nikita nous nous connaissons depuis 2009. Quand il a sorti leur démo avec DWEF, je l’ai contacté sur MySpace et de là a débuté une amitié dans laquelle nous avons toujours évoqué notre intention de travailler ensemble. Mais nous n’avions pas pu le faire par manque de temps et divers engagements.
En 2016, nous avons commencé à en parler plus précisément. Je lui ai montré ce que nous avions enregistré avec Cris et il a eu envie que nous travaillions ensemble d’une manière ou d’une autre. Sachant que sa priorité était et est DWEF, il s’est chargé de composer et d’enregistrer les lignes de basse. Il a également produit et fait le mixage et le mastering de l’EP et de l’album.
Nikita n’est pas seulement un compositeur et un excellent multi-instrumentiste, mais aussi un producteur incroyable de qui nous avons beaucoup appris pendant tout ce temps où nous avons travaillé ensemble. Et bien qu’il ne soit pas un membre à part entière du groupe, nous le considérons comme une partie importante et fondamentale du projet.
AG : Quelle est la signification de l’artwork conçu par Matt Lombard et sa relation avec le concept de l’album ?
C : Matt est un artiste incroyable. Dès que nous avons pris contact avec lui, il a parfaitement compris le projet, il s’est plongé dans les paroles et nous a proposé des œuvres qui étaient intimement en phase avec ce sur quoi nous travaillions. Ainsi, pièce après pièce, tout se connectait parfaitement, comme un grand puzzle qui a commencé à façonner ce que serait l’album.
AG : Peux-tu nous dire quelle est la relation entre le métal extrême et plus particulièrement le black metal et les gens dans ton pays ? Peut-on voir la même passion que celle que l’on peut remarquer en Scandinavie pour le black metal ou aux USA pour le death metal (en France, c’est vraiment pauvre, ce n’est pas vraiment un pays où cette musique pourrait se développer) ?
D : Le Metal extrême en Argentine n’est pas très populaire. Il y a un certain public plus lié au Thrash et au Death metal, mais pas très nombreux. En fait la part du métal en général n’est pas très importante. Notre pays a une très petite scène comparée aux autres pays de la région. L’Argentine a une culture plus liée au rock qu’au métal. Et si nous ajoutons à cela la difficulté d’un genre autant de niche que le Black Metal, eh bien … le nombre de personnes qui s’y intéressent est très très faible. Dans les années 90, nous n’étions qu’une poignée à en écouter, aujourd’hui ce nombre a augmenté mais pas de façon significative. Pour certaines personnes, c’est une bonne chose.
C : Je pense que les argentins sont très passionnés par la musique et, si cette passion est le métal extrême, alors c’est pour la vie. Peut-être n’avons-nous pas une grande scène mais nous ressentons cette musique comme quelque chose de très personnel, bien que chaque personne vive cette passion d’une manière totalement différente.
AG : Quand la pandémie sera derrière nous, une tournée européenne est-elle prévue ? Peut-être en France (je l’espère) ?
D : LMDM c’est un projet studio, mais nous n’avons pas écarté l’idée de le faire en live. Mais beaucoup de choses doivent se mettre en place pour cela, et nous ne savons pas encore ce que nous ferons. Cependant, avec Cris nous travaillons simultanément sur un autre projet créé pour le live, avec un black metal un peu plus raw et direct. Le but principal de ce nouveau projet est de partir en tournée, donc oui une tournée européenne sera sur notre liste.
AG : Merci pour vos réponses et j’ai hâte d’écouter vos prochains titres. Avez-vous déjà des projets ?
D : Nous faisons la promotion de notre album en ce moment, tout en continuant à travailler sur les autres projets mentionnés précédemment. Je pense que d’ici la fin de l’année nous commencerons à travailler sur les chansons de notre deuxième album.
AG : Merci encore, à bientôt !
D : Merci pour le soutien et l’intérêt que vous portez à notre musique.
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